mardi 29 juin 2010

Daily Fiction, premiers textes

A peine une petite semaine sur Libé et déjà plus de 6000 visites...
On n'en attendait pas autant. Merci !

Heide
J’ai connu Heide pendant ces jours où l’air a la consistance fraiche et poudrée qui tombe sur l’été avec les derniers froids. D’elle, je retiendrai ces promenades que nous faisions dans la ville où je la voyais sautiller comme une gosse de dalle en dalle, son profil de princesse russe, son air d’icône, la facilité avec laquelle elle résistait aux questions indiscrètes que posent habituellement les gens.

Avec elle, je me disais : «entre nous, ce sera court.»




Long distance call
J’ai appelé après des mois de silence, à cause de la nuit, du bruit laiteux de la mer, à cause de la douceur un peu moite de cette fin de journée, de l’eau qu’elle aimait tant, du silence qu’elle aurait su garder.
De l’eau, elle disait : « c’est bon, ça a le goût de ta bouche, je peux l’aimer les yeux fermés ».

Au téléphone, sa voix était éteinte et fade. J’ai failli raccrocher. Puis, en entendant mon nom elle est redevenue l’enfant fraîche et rapide que je connais.
Elle a dit : « tu es changé… j’aime pas. »
Moi non plus, j’aime pas, mais il faut parfois du temps pour se relever.
Elle ne m’a pas demandé où j’étais, m’a juste dit qu’elle entendait la mer.

- Dis moi, tu vois quoi…
Je lui ai dit que le ciel était comme du lait tiède, que le sable était humide et qu’il me collait aux pieds, que derrière moi, dans les arbres, les corbeaux battaient des ailes, qu’un bateau rouge et vert passait au loin.
- C’est comment déjà le vert, j’ai oublié ?
Je lui ai dit que le vert c’était comme le mois de mai quand on se réveillait, que c’était vif, que c’était comme ce jour, à Queensbrige Park, devant Roosevelt Island, où je lui avais parlé des tableaux de Bonnard.

- Si c’est ça le vert, alors, tu es heureux.


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